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Agana (Artiste-chanteur) : « Je suis un reggaeman militant »

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A Abidjan dans le cadre de la promotion de son nouveau single ‘’Entrez dans le game’’, une œuvre qui se définit comme un cri de résistance, un hymne à la liberté et une invitation à danser, Agana s’est confié à L’Avenir. Sans faux fuyant, il a répondu à nos questions.

Vous êtes de retour à Abidjan depuis quelques temps où vous avez même un concert le week-end dernier à AZK Live, un temple de promotion du reggae sis à Cocody-Blockhaus. Quel symbole derrière ce retour au pays ?

Agana est sorti avec un titre qui s’appelle ‘’Entrez dans le game’’, ce qui marque le retour du game. AZK, c’est la logique d’une tournée qu’on a mise en place en commençant par notre participation à un festival a Abobo, en passant par le FICAD de Daoukro.

 

Il y a bien longtemps, tout jeune que vous pratiquez la musique mais depuis, il vous est toujours difficile de vous faire véritablement un nom sur la scène discographique ivoirienne. Quel est le problème ?  

Si je n’étais pas parvenu à me faire un nom, je ne pense pas que vous seriez là. (Il s’énerve). Il y a bien une entité qui existe, je puis vous rassurer. Et comme j’aime à le dire très souvent, toute personne a son parcours de vie. Très humblement, je pense que je me suis fait un nom maintenant maintenir la cadence est un autre problème. J’avais décroché à un moment, c’est une réalité. J’ai pris le temps pour ma petite famille et pour moi-même pour me faire mon parcours de vie. J’ai mieux appris de certaines choses pendant ce temps.

 

Quel était le véritable motif derrière cette pause familiale ?

Je devais suivre mes enfants et mes petits-enfants. Je parais certes jeune d’apparence mais de la vie, j’en ai vue. Aujourd’hui, j’estime qu’ils ont grandi donc je peux reprendre la route.

 

Pendant cette pause familiale en Europe, vous viviez de quoi concrètement, de la musique ou plutôt d’un ‘’Djôssi’’ ?

Je vis de beaucoup de choses entre autres de la musique, de mes affaires et du travail que j’ai appris. Mon seul problème est que je ne sais pas garder un travail pendant longtemps. Je n’aime pas la routine, je m’ennuie très vite. Quand je pense avoir fait le tour, je me pose. C’est d’ailleurs pour cela qu’à un moment, j’ai décidé de mettre une pause à la musique. J’ai joué dans de gros festivals.

 

Quand vous parlez de travail, c’est quoi concrètement ? Avez-vous eu des diplômes universitaires en dehors du fait qu’on vous connait comme musicien ?

J’ai fait l’école, j’ai fait des formations. J’ai fait la sécurité incendie, la logistique en entrepôts, le tout sanctionnés par des diplômes et des certificats. J’ai vécu l’aventure, pleinement. Je sais vraiment ce que c’est que l’aventure et ses vicissitudes.  

 

Ce n’est pas choquant de savoir que le fils d’Alpha Blondy que vous a fait l’aventure ?

Non, du tout ! A vrai dire, j’étais parti pour mon album et je suis tombé amoureux d’une femme et j’ai calé. J’ai vécu près d’une quinzaine d’années avec cette femme. Comme je n’avais pas la nationalité française, j’étais contraint de faire plusieurs démarches administratives pour être résident.

 

Etes-vous finalement parvenu à avoir la nationalité française ?

Je suis résident. Ma femme est ivoirienne.

 

En choisissant de ne pas choisir la nationalité française pour être exclusivement ivoirien, n’est-ce pas pour vous éviter les mêmes problèmes rencontrés par le président du PDCI, Tidjane Thiam ?

Ce qui fait rire dans cette histoire, tous ceux qui soutiennent ca sont des personnes nées avant 1960. Ce sont des stupidités et des conneries. C’est vraiment avec mépris que je regarde ca et je trouve cela insultant. Nous n’avons pas tiré les leçons de l’histoire, nous sommes sans mémoire. On ne devrait plus se retrouver dans ces affaires de nationalité.

 

Vous vous définissez comme un reggae engagé ou plutôt comme un reggaeman militant ?

Je suis un reggaeman militant. On peut être engagé pour un travail, pour le métier pour lequel on est mais le militant milite pour son pays, pour une mémoire réelle. J’ai malheureusement l’impression que les gens n’ont pas de mémoire parce qu’ils reproduisent les mêmes erreurs au centimètre près.

 

C’est bientôt l’élection présidentielle. En tant que reggaeman militant, quel message ?

Il faut faire la politique autrement, de manière plus apaisée et plus honnête. On n’est pas obligé de copier la politique à l’occidental où se met les peaux de banane. Eux encore, ils se fixent des règles, ce qui n’est pas le cas ici. Comment comprendre que chaque fois qu’on se rapproche des élections, on doit toujours trembler ?

 

N’est-ce pas quelque part l’inaction de vous autres artistes qui ont du mal à jouer leurs rôles de sensibilisateurs et éveilleurs de conscience ?

Notre inaction est à l’image du peuple. Vous journalistes non plus, vous n’intervenez pas. Les artistes Zouglou par exemple parlent toujours. Les reggaemen ont tellement parlé qu’ils préfèrent se taire désormais. Pourquoi les gens veulent toujours ce soient nous les artistes qui dénonçons ? Vous pensez qu’on n’a pas d’enfant aussi ? On veut bien lancer mais il faut bien que le peuple suive aussi. Ce qui est en train de se passer est grave.

 

Mais comment expliquez-vous que de grandes voix comme Alpha Blondy, Tiken Jah soient muettes ?

C’est leur problème ! A l’époque lorsqu’ils parlaient, qui a suivi ? Quand Alpha Blondy chantait ‘’Armée française, allez-vous en !’’, vous avez suivi ? Le peuple était où ? Maintenant, comme tout bon prophète, a un moment Dieu met fin à ta mission parce qu’estimant que tu as accompli la mission qu’il t’a assignée. Les Tiken Jah qui ont supporté le régime en place lorsqu’il a chanté ‘’Gouvernement 20 ans’’, est-ce qu’on ne lui a pas interdit un spectacle à Abobo ?  Qu’est-ce que le peuple a fait ? Pourquoi voulez-vous donc que ce soient seulement eux qui parlent ? J’ai fait sortir des titres que personne n’a écoutés. C’était la prophétie de beaucoup de choses. J’ai chanté même l’insécurité sociale. Vous voulez donc que vos artistes soient des porte-voix de personnes silencieuses ?

 

Avec votre vision, pensez-vous vraiment pouvoir vous asseoir à la même table que votre père Alpha Blondy pour discuter ?

Dieu merci qu’Alpha Blondy et moi on ne soit pas d’accord sur beaucoup de choses. Si on était d’accord sur tout, cela voudrait dire que je n’ai pas d’entité. Si nous humains, on n’est pas d’accord avec Dieu, ce n’est pas avec le ‘’Vieux’’ que je vais d’accord sur tout. On a des points d’accord et des points de désaccord.

 

Pareil avec votre petite sœur Soukéïna qui aussi a embrassé une carrière d’artiste-chanteuse ?

Pourquoi je devrais être d’accord avec elle sur tout si même avec notre père je ne partage pas du tout ? Sur sa carrière musicale, il y a bien longtemps que ma sœur fait de la musique. Le seul problème, c’est que je ne comprends pas pourquoi ma petite sœur Soukéïna fait du reggae. Je ne comprends vraiment pas pourquoi on veut la mettre dans le reggae. Elle est une très bonne chanteuse de new soul, de jazz et autres musiques expérimentales. Elle est très forte dans ce genre de musique. Je parle en conséquence de cause et je la connais mieux que quiconque.

 

Tout comme père connaissait mieux que lorsqu’il ne voulait pas que vous embrassiez une carrière musicale, n’est-ce pas ?

C’est la légende populaire. C’est moi et non pas lui. Je ne voulais pas faire la musique préférant finir mes études d’abord. Alpha Blondy a toujours voulu que je chante. En son temps, je faisais des répétitions à la maison avec lui mais je n’étais pas prêt pour embrasser une carrière musicale. Dans ma jeunesse, j’avais envie de kiffer ma life.

 

Si on vous demandait pourquoi vous êtes ce reggaeman qui ne porte pas de loccks ?

Les reggaemen qui ne portent pas de locks, il y en a plein. Si j’épouse la philosophie rasta, je vous dirais que je voudrais bien ressembler à mon maitre, Haïllé Selassié. Je voudrais donc être à l’image de mon King, sans locks.

 

Parvenez-vous à vous passer de l’herbe ?

Vous êtes en train de me demander si je fume ? Non, je ne fume pas l’herbe encore moins le joint. J’aurais aimé mais non je ne fume pas de joint. Je ne suis pas en phase avec. Ce n’est pas quelque chose qui m’a déjà intéressé par contre mon petit-frère fume (il nous le présente). Par contre lui, il ne chante pas et ne compte même pas suivre cette voie, c’est un businessman.

 

Philip KLA

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