Éditos

L'édito de Bernard KRA : La politique à l’heure des choix stratégiques

ledito-de-bernard-kra-la-politique-a-lheure-des-choix-strategiques
PARTAGEZ
La scène politique ivoirienne a été particulièrement animée ce weekend. Et il en sera ainsi jusqu’à la fin de ce mois de juin et jusqu’à l’élection présidentielle du 25 octobre 2025. Tandis que le PDCI-RDA battait le pavé sous une pluie battante à Abidjan, le RHDP, achevait ses pré-congrès régionaux avec un fort intérêt pour l’Hexagone où une marée orange s’est emparée de la capitale française, Paris.

Dans le même temps, le candidat déclaré Antoine Assalé Tiémoko célébrait avec faste, l’an 1 de sa formation politique, au pied de la Basilique à Yamoussoukro. Tout ceci intervient 48 heures après une lettre adressée au peuple de Côte d’Ivoire par l’ancien président Laurent Gbagbo qui, avec des œillères particulières, trouve que la Côte d’Ivoire court vers le précipice. Qu’à cela ne tienne. La leçon que l’on peut tirer de toutes ces manifestations, c’est que nul ne peut soutenir que les libertés politiques et civiques sont bâillonnées en Côte d’Ivoire. Gbagbo a publié sa fameuse lettre en accablant le régime, sans que la répression supposée ne s’abatte sur son parti. Le PDCI-RDA a organisé sa marche qui a été très bien encadrée par les forces régaliennes, sans qu’aucun militant ne soit gazé. La restriction des libertés et la chasse aux opposants supposées ne sont qu’un artéfact de l’opposition ivoirienne qui est manifestement prise au piège de ses mauvais choix stratégiques. L’on ne le dira pas assez, mais l’objectif de la création d’un parti politique, c’est la conquête, l’exercice et la conservation du pouvoir.

A lire aussiPré-Congrès du RHDP de Cocody : Mamadou Touré donne son avis sur Laurent Gbagbo 

Mais sous nos cieux, les deux principales formations politiques semblent avoir fait le choix de la déification de leurs leaders respectifs, au détriment de l’objectif de la conquête, de l’exercice et de la conservation du pouvoir. Il n’est pas mauvais de faire solidement bloc derrière son leader, mais quand un obstacle quasiment insurmontable se dresse sur le chemin, le bon sens aurait voulu que l’on cherche des voies de contournement, sans pour autant se renier et abandonner son chef. L’histoire du peuple Baoulé en Côte d’Ivoire en est une parfaite illustration. Devant l’obstacle de la rivière infranchissable, la reine Abla Pokou a sacrifié son unique enfant afin de préserver la vie de son peuple. Aucun sacrifice n’est donc de trop, quand il s’agit de l’intérêt de ceux pour qui l’on se bat. Mais sous nos cieux, les leaders politiques préfèrent sacrifier la cause de leurs partis et de leurs militants pour leurs propres personnes. Laurent Gbagbo et Tidjane Thiam, puisque c’est d’eux qu’il s’agit, contrairement aux grands hommes de vision, ont fait le choix de leurs propres personnes, au détriment de ceux pour qui ils prétendent se battre. Tous deux refusent qu’il y ait des alternatives, en dehors de leurs personnes, pour participer à l’élection présidentielle d’octobre 2025. La marche du PDCI-RDA de ce week-end achève de convaincre que le parti pouvait envisager un plan B, tout en continuant la bataille pour la réintégration de son chef dans le fichier électoral.

A lire aussiPré-congrès éclaté du RHDP : les militants réclament la candidature de Ouattara

Au Sénégal qui est devenu une référence en science politique aujourd’hui, le PASTEF n’a pas dit que le parti ne participerait pas au processus électoral, sans son leader charismatique Ousmane Sonko, étant frappé par une décision judiciaire. C’est le leader lui-même qui a proposé un plan B, tout en n’abandonnant pas la lutte. Aujourd’hui, le PASTEF est au pouvoir. Mais sous nos cieux, au PPA-CI, on continue de surfer sur le ‘‘Gbagbo ou rien’’. Au PDCI RDA, l’on soutient que Tidjane Thiam est le plan A jusqu’à Z du vieux parti. À 80 ans, Laurent Gbagbo ne songe pas aux générations futures de son parti et prétexte que rien ne peut se faire sans lui. Tidjane Thiam dont on vante tant les mérites, continue de se prendre comme un démiurge, le deus ex machina sans qui le PDCI-RDA ne doit aller à aucune compétition électorale.

A lire aussiRetraits de Thiam et de Blé Goudé de la liste électorale : La CAP-CI dénonce un coup de force du gouvernement qui entend choisir les adversaires du RHDP

Nous sommes à quatre mois de l’élection présidentielle et l’effervescence politique de ce week-end est le début d’un processus irréversible. Si les choses restent en l’état, les Ivoiriens iront donc aux urnes le 25 octobre 2025 sans le PPA-CI et le PDCI-RDA qui devront attendre 2030 avant d’espérer revenir dans le jeu électoral. Comme on peut le voir, le risque politique est énorme pour l’avenir de ces deux formations. Il n’est donc pas trop tard pour faire des choix stratégiques, car comme l’a indiqué le Général De Gaulle, « il n’y a pas de politique qui vaille en dehors des réalités. Un chef doit savoir trancher, surtout quand l’avenir de la nation ou du parti est en jeu ».

Bernard KRA

Newsletter
Inscrivez-vous à notre lettre d'information

Inscrivez-vous et recevez chaque jour via email, nos actuaités à ne pas manquer !

Veuillez activer le javascript sur cette page pour pouvoir valider le formulaire