
Ce document met en lumière une triple dynamique inquiétante : l’augmentation de la consommation, la diversification des substances, et le rôle croissant du continent africain dans les circuits mondiaux de production, de transit et de distribution.
D’abord, le cannabis reste la substance la plus consommée. En Afrique de l’Ouest et du Centre, un adulte sur dix en fait usage, soit plus du double de la moyenne mondiale. Cette consommation touche principalement les jeunes de moins de 35 ans, et représente la majorité des cas traités dans les centres spécialisés. En 2023, l’Afrique a concentré 44 % des saisies mondiales de cannabis, avec l’Afrique du Nord comme principal point d’exportation vers l’Europe.
Ensuite, la cocaïne connaît une progression fulgurante. Tandis que sa production mondiale explose, l’Afrique de l’Ouest devient un hub stratégique de transit vers l’Europe. Des milliers de personnes y sont déjà prises en charge pour des troubles liés à cette substance. Parallèlement, les opioïdes et drogues synthétiques envahissent le continent. Le tramadol, un opioïde bon marché, inonde l’Afrique de l’Ouest, du Nord et du Centre. Entre 2019 et 2023, 57 % des saisies mondiales de ce médicament détourné ont eu lieu en Afrique. De plus, les saisies d’héroïne augmentent en Afrique de l’Est, tandis que des substances comme le « kush », un cocktail dangereux d’opioïdes synthétiques, se répandent en Afrique de l’Ouest et australe.
Sur le plan sanitaire, la situation est alarmante. Plus de 1,3 million de personnes s’injectent des drogues en Afrique, dont 204 000 vivent avec le VIH. L’Afrique australe détient le taux le plus élevé de VIH chez les injecteurs (43 %). Pourtant, l’accès aux médicaments antidouleur reste dramatiquement faible : en Afrique de l’Ouest et du Centre, on ne compte que sept doses standard par million d’habitants par jour.
En outre, les femmes sont largement sous-représentées dans les statistiques officielles, avec un ratio d’une femme pour neuf hommes dans l’usage de cannabis. Ce déséquilibre suggère une réalité probablement sous-estimée et insuffisamment prise en charge.
Face à cette crise multidimensionnelle, l’Afrique se retrouve au cœur d’un système criminel transnational complexe. À la fois productrice, consommatrice et zone de transit, elle est confrontée à une menace globale.
C’est pourquoi, l’ONUDC appelle à un renforcement urgent des politiques de prévention, de traitement et de coopération régionale. Car sans action coordonnée, cette crise ne fera que s’amplifier.