
Monsieur le sénateur, notre curiosité nous a amené à découvrir que le Premier ministre Robert Beugré Mambé a fait deux œuvres en 2000 qui, hélas, n’ont été publiées qu’en une poignée d’exemplaires ! Par la suite, avons-nous appris que vous avez résolu de faire connaître ces productions intellectuelles au grand public. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Vous avez totalement raison et je ne vous reproche pas votre désir d’aller toujours à la recherche de l’information. Effectivement, en l’an 2000, Son Excellence Monsieur le Premier Ministre Robert Beugré Mambé écrit deux ouvrages remarquables. Il s’agit de “Voiles”, un recueil de poèmes, et d’un texte de ses prédications – vous savez, sans doute, que le personnage est prédicateur, par ailleurs – qu’il a intitulé “Une affaire de place”. Ils n’ont pas fait l’objet d’une grande promotion auprès du public, à l’époque, parce que ce n’était pas vraiment le souci de l’auteur. Moi-même, je les avais lus, par curiosité, disons. Et puis, récemment, j’en ai repris la lecture, avec un œil plus attentif… Et c’est là que j’ai été proprement subjugué, édifié: j’étais en présence de textes d’une beauté autant stylistique que spirituelle ! Bref, une production littéraire majeure qui, me suis-je dis, méritait d’être promue, connue du maximum de nos concitoyens habitués à la lecture des œuvres de l’esprit.
l’homme est d’une humilité extrême
Venons-en donc à ces deux productions ! Certes, vous louez leur beauté stylistique et spirituelle… Mais, pour vous engager à rééditer ces œuvres du début des années 2000, vous deviez avoir d’autres raisons ?
Deux raisons essentielles ont présidé à ma résolution de faire connaître à un public plus large, les deux contributions intellectuelles de monsieur Mambé. La première raison, c’est que je crois connaître assez bien monsieur Robert Beugré Mambé, pour savoir que l’homme est d’une humilité extrême, telle que parfois, il peut exprimer des paroles fortes, puissantes, dignes d’être méditées dans des séminaires, ou bien enseignées comme leçons de vie à ses contemporains, tout en se préservant des éloges, de la popularité que cela pourrait lui valoir. Il donne le sentiment de craindre d’être encensé, louangé, exposé sous les feux de la rampe, pour ce qu’il professe. La deuxième raison réside dans le fait que je suis croyant, moi-même, et que je m’efforce autant que faire se peut de mettre en pratique ma foi, en veillant à ce que, comme dit la Parole, “la lampe ne soit pas allumée pour être mise sous le boisseau, mais pour éclairer la pièce”. Et les paroles de Robert Beugré Mambé, contenues dans ses deux productions des années 2000, sont pour moi comme une lampe.
C’est un véritable traité d’humilité
Qu’avez-vous à nous dire en primeur sur les deux ouvrages, à commencer par le premier ?
Le premier ouvrage publié par le Premier ministre Robert Beugré Mambé en 2000 est une prédication. Il a pour titre “Une affaire de place”. En son temps, monsieur Mambé n’était ni Premier ministre, ni même ministre-gouverneur mais plutôt consultant pour la Côte d’Ivoire et la Banque mondiale sur le projet Politique d’appui à la politique de l’habitat (PAPH). “Une affaire de place” est une référence à deux passages de l’Evangile de Jésus-Christ. C’est un véritable traité d’humilité. Dans le premier passage, une femme, Zébédée, mère de Jacques et Jean (des disciples de Jésus), sollicite de Jésus qu’à l’heure où il serait établi dans son royaume, il admette ses deux fils à ses côtés; l’un assis à sa droite et l’autre à sa gauche. À cette préoccupation de mère, Jésus rétorquera que ce n’est pas à lui d’attribuer les places au ciel et que cette prérogative relève de la pleine souveraineté de Dieu. “Une affaire de place” réfère également à un autre passage de l’Evangile où les disciples de Jésus, se mêlant de querelles de positionnement, demandent à Jésus de leur dire lequel d’entre eux était le plus grand. Ce à quoi Jésus répondra, sans ambages, par une cinglante leçon d’humilité : il leur fait savoir qu’ils sont tous importants et que celui d’entre eux qui voudra s’élever sera abaissé mais que celui qui s’abaissera sera élevé.
Dieu a réussi à prouver aux chiffres qu’ils étaient tous importants
On imagine aisément, au ton par lequel vous l’évoquez, combien le rappel de cet épisode de l’Evangile vous a particulièrement marqué !
Le Premier ministre, alors consultant pour la Côte d’Ivoire et la Banque mondiale, a utilisé un procédé littéraire digne des anciens grands maitres de la littérature, “l’allégorie”. Je pense à Homère et à Platon.
Pour rappeler la querelle des disciples de Jésus, Robert Beugré Mambé a imaginé une querelle d’hégémonie entre les chiffres de 0 à 9. Pour se départager, les chiffres se sont rendus chez le Bon Dieu, afin de savoir lequel d’entre eux était le plus grand. Dieu, dans son infinie sagesse, a prouvé aux chiffres qu’ils étaient tous aussi importants, les uns que les autres. Même s’agissant de 0 dont on a tendance à penser qu’il est nul, Dieu leur a fait une démonstration magistrale. Mettez 0 avant 1, par exemple, et vous le trouvez sans valeur, mais mettez-le après 1, et 1 devient 10. Par des démonstrations similaires, Dieu a réussi à prouver aux chiffres qu’ils étaient tous importants, selon la place qu’ils occupaient et l’opération dans laquelle ils étaient impliqués. Par le biais de cette allégorie, l’on découvre la perspicacité, l’esprit imaginatif de Robert Beugré Mambé. Moi, cela me séduit et me fascine, je l’avoue.
Et le second ouvrage qu’en est-il ?
Le second ouvrage du Premier Ministre Mambé, a pour titre “Voiles”. Il a été publié en même temps que celui dont je viens de parler. C’est un recueil de 43 poèmes, traitant de tous les sujets qui préoccupent l’homme en tant qu’être vivant en société, de sa place dans l’univers et de ses rapports avec Dieu. Le titre de cet ouvrage “Voiles” suggère que l’homme avance en ce bas monde en ayant les yeux voilés, ne sachant pas que l’ennemi se trouve parfois en lui-même, du fait de ses mauvaises pensées et de ses mauvais sentiments. Sur ce second ouvrage composé de 43 odes, comme je l’ai dit plus haut, j’ai mené une étude très poussée dont les conclusions ont fait l’objet d’une publication que je vous invite à consulter.
Robert Beugré Mambé est un homme de foi et tout en lui respire cette foi
Nous le ferons, volontiers. Pour l’heure, pouvez-vous nous dire votre impression générale sur les deux ouvrages ?
Au sujet des deux ouvrages, je dirais que Robert Beugré Mambé, le Premier ministre, est un homme de foi qui ne sait rien penser, rien faire et rien écrire, sans une référence formelle et franche à Dieu. Nos maîtres religieux nous ont dit que la foi sans les œuvres est vaine. Robert Beugré Mambé est un homme de foi et tout en lui respire cette foi. Ce n’est pas par hasard, si un membre du gouvernement ivoirien a pu lui rendre cet hommage, publiquement: « Excellence, Monsieur le Premier ministre, votre pureté intérieure impacte positivement l’action gouvernementale ». Il s’agit du ministre des Mines, du Pétrole et de l’Énergie, M. Mamadou Sangafowa Coulibaly, au Salon international des ressources extractives et énergétiques (SIREXE 2025).
Dans “Une affaire de place”, notamment au chapitre 6, la lutte pour le positionnement est très marquée. En tant qu’analyste des œuvres du Premier ministre, comment expliquez-vous cette dynamique en lien avec les enjeux politiques qui émergent dans le contexte post-électoral, à quelques mois de la présidentielle de 2025 ?
Votre question apporte de l’eau à mon moulin et indique combien la réédition de cet ouvrage vient à son heure. En effet, nul n’ignore que nous sommes dans une année électorale où les bataille de positionnement font rage. La lecture de cet ouvrage pourrait apporter aux lecteurs, une autre manière de considérer leurs ambitions en leur suggérant de ne pas faire abstraction de la dimension spirituelle de la vie. Ici, il s’agit de se tourner vers Dieu, car c’est Lui qui établit toute autorité.
Dans “Une affaire de place”, le chapitre 4 évoque la construction de la paix et de la cohésion au sein de la famille. Si l’on étend cette réflexion au niveau national, quel message ce livre peut-il apporter à une population inquiète en cette période post-électorale ?
“Une affaire de place” est également une invitation à la paix, à la cohésion sociale, et à l’unité nationale. Sur plusieurs pages, l’auteur expose différentes formes de courses à la première place. Il part du cercle familial à l’Etat, en passant par nos chefferies traditionnelles et nos régions. Pour dire que toutes les couches de la société doivent inlassablement œuvrer avec l’aide de Dieu, à la recherche et au maintien de la cohésion sociale en cette période électorale.
Il propose une approche spirituelle et sage face à l’injustice et à la calomnie
À la lumière de votre analyse de “Voiles”, quel enseignement ce livre offre-t-il à ceux dont l’honneur est mis à mal sur les réseaux sociaux ?
“Atteinte à la réputation” met en lumière la compétition envers soi-même, en cas d’agression, et la façon dont l’être humain doit affronter les atteintes à son honneur. Il propose une approche spirituelle et sage face à l’injustice et à la calomnie. Plutôt que de céder à la colère ou à l’amertume, nous devons voir dans ces épreuves, une occasion de dépassement de soi, d’humilité, de gratitude et de prise de conscience sur la nature humaine. C’est ce que recommande l’auteur. Ce poème rappelle que Dieu, dans Sa sagesse infinie, transforme les humiliations en opportunités de croissance et d’élévation spirituelle.
Votre mot de fin ?
"Une affaire de place” et “Voiles” sont deux ouvrages par lesquels le Premier ministre, Robert Beugré Mambé a frappé fort, à la porte du cercle restreint des grands écrivains de la littérature ivoirienne. Pour un coup d’essai, on peut dire qu’il s’agit d’un véritable coup de maître.
Source : AIP