
C'est la première fois que la Guinée s'adresse aux gouvernants, aux investisseurs à ce forum. Quelles sont vos attentes après la participation de la Guinée à cet événement ?
La présence de la Guinée et ma présence surtout ici, c'est de réaffirmer notre volonté d'aller dans cette direction, d'assurer la promotion d'un décollage économique, en met- tant en avant ce que l'État doit faire. L'État doit permettre la mise en place des infrastructures, assurer la connectivité, également la stabilité des institutions, le cadre des investissements qu'ils soient attractifs, prometteurs, et que la justice fasse correctement son travail. Et puis, bien entendu, l'État a le devoir de faire la promotion du capital humain à travers l'école, la santé et les autres aspects qui permettent à une société d'avoir des liens solides pour ne pas laisser certaines fractions, relativement importantes, de la population par derrière. Et ça, c'est de manière générale.
Et à l'heure actuelle, la Gui- née est en train de reprendre le dessus. Le projet Simandou est un projet minier, l'un des plus importants au monde dans la phase actuelle et dans le secteur du fer, avec la construction d'un chemin de fer d'environ 700 kilomètres, d'un port, et pour assurer les liaisons avec les mines. Cela transforme notre environnement et nous permettra de diversifier notre économie. Bien sûr, avec ces voies ferrées, qui ne sont pas simplement des voies ferrées pour le transport minéralier, mais pour les personnes et les marchandises. Il faut que le monde entier sache cela. Surtout pour ces investisseurs potentiels qui s'intéressent à la Guinée. Parce que la Guinée a des atouts sur les plans minier et agricole. Elle a une population qui est un marché potentiel non négligeable, d’environ 17 millions de personnes. La Guinée est de retour. La Guinée entend assurer la promotion du secteur privé, assurer la stabilité institutionnelle.
Vous avez abordé deux grands axes qui sont réellement les piliers économiques au- jourd'hui de la Guinée, que sont les secteurs minier et l’agricole. Par contre, il y a d'autres axes où la Guinée est un peu déficiente, notam- ment l'électricité et le carburant. Est-ce qu'en venant ici au Forum, vous avez pu trouver des partenaires pour redynamiser encore tous ces secteurs ?
L'année dernière, sur le plan énergétique, nous étions nettement en dessous de la satisfaction de nos besoins. Et nous saluons encore une fois cette interconnexion qui était déjà là, avec la Côte d'Ivoire, d'un côté, et avec le Sénégal, lorsque nous avons été confrontés à cette situation particulièrement difficile. Donc, l'interconnexion avec la Côte d'Ivoire nous a permis de pallier notre déficit énergétique. C'est une occa- sion de rappeler que l'intégration économique à travers des infra- structures essentielles est une réalité dans cet espace, de Dakar à Abid- jan, en passant par Conakry. Mais je vais vous dire que cette année, il n'y a pas eu de coupure d'électricité à Conakry. Malgré la saison sèche qui est en train de se terminer, nous avons pu régler notre approvisionnement en électricité. Et les projets que nous avons mis en œuvre, permettront dans un laps de temps, d'assurer une capacité de production d'électricité supplémentaire de l'ordre de 1,3 gigawatts. Cela veut dire que depuis que la Guinée est indépendante, elle n'a jamais pu assurer ce niveau de production.
En l'espace de deux années, nous aurons, avec l'aide de Dieu, une production supplémentaire d'électricité de 1,3 gigawatts pour satisfaire nos besoins et mettre à la dis- position de nos pays frères frontaliers, le sur- plus ou l'excédent. Ceci, pour leur permettre également de satisfaire les besoins de leurs populations. Notre ambition actuelle est d'aller vers l'industrialisation, de créer des nouvelles raffineries et d'encourager les secteurs miniers à respecter les obligations pour installer sur place la transformation. Nos besoins énergétiques vont être encore plus que ce que nous aurons, même si nous assurons une production supplémentaire de 1,3 gigawatts. D'où, la nécessité d'être encore, à un moyen terme, beaucoup plus inventifs pour accroître nos capacités énergétiques. L'industrie, le commerce, la circulation des per- sonnes, tout était complètement bloqué. Mais grâce à Dieu, avec une capacité de réactivité, les équipes gouvernementales ont réussi à maintenir la Guinée, mal- gré tout, hors de l'eau. L'économie a reçu un choc terrible. Mais au bout de l'année, c'est-àdire en 2024, le taux de croissance économique du pays est passé à l'ordre de plus de 6%, entre 6 et 6,5%. Cela veut dire que l'économie guinéenne a été fortement résiliente et a pu progresser, malgré cette catastrophe qui est intervenue pratiquement à la fin de l'année 2023. C'est l'occasion aussi de remercier la population guinéenne qui a été très stoïque, très résiliente à supporter cela avec dignité. Et nous sommes aujourd'hui dans une phase où progressivement, nous sommes en train de réduire nos fragilités et de trouver des solutions pérennes.
Comment évaluez-vous la coopération écono- mique entre la Côte d'Ivoire et la Guinée ?
J'ai eu des échanges fructueux et très intéressants avec le Premier ministre et frère, Robert Beugré Mambé où nous avons évoqué la qualité de nos relations. Ces relations sont bonnes, mais nous avons été beaucoup plus satis- fait de la qualité des relations entre des hommes et des femmes de par leurs activités ivoiriennes et guinéennes, les artistes, les musiciens. En d'autres termes, ce sont les populations ellesmêmes qui ont déve- loppé des relations et les États ont été relative- ment timorés au cours de cette période. Avec Monsieur l'Ambassadeur, il a été rappelé que la Grande Commission mixte entre la Guinée et la Côte d'Ivoire n'a pas pu se tenir depuis 2014 pour différents faits, mais ça fait presque 11 ans.
La proximité et les convergences entre la Guinée et la Côte d'Ivoire font que ceci doit être corrigé, le plus rapidement possible. Parce que nous devons avoir des voies identiques par rapport à la complémentarité de nos économies et à la complémentarité, en ce qui concerne les plans de développement de nos infrastructures. Et c'est cela qui a été re- tenu. Et tout à l'heure, il y a Monsieur Gaussou Touré, le ministre-gouverneur de la région de Denguélé avec qui nous avons échangé. Et l'objectif s’inscrit dans le sens du renforcement de la coopération avec la Côte d'Ivoire. C’est d'aller jusqu'à encourager de manière directe, la coopération entre les régions pour que, de part et d'autre de la frontière, il y ait des échanges et des activités communes pour la complémentarité des économies et pour la complémentarité. Et ceci est très important dans un contexte où certaines parties de nos frontières sont relative- ment dans une phase d'insécurité, du fait de la propagation du courant djihadiste au Mali.
Au CEO Forum Africa, il a certes, été question du développement, mais aussi d'investissement et de finance. Avez-vous pu avoir des échanges avec ces structures techniques ?
Je dois dire d'ores et déjà que les institutions financières accompagnent la Guinée. Maintenant, il faut qu'on actualise certaines dispositions de manière beaucoup plus effective. Nous sommes enga- gés dans la mise en œuvre d'accord avec le Fonds monétaire inter- national. Et ceci est à l'ordre du jour pour permettre à la Guinée d'avoir l'assistance technique et l'appui des partenaires techniques et financiers pour la réalisation de ses ambitions sur le plan économique et sur le plan social. La plupart des cabinets que vous avez évoqués, sont présents en Guinée aujourd'hui. La mise en œuvre du programme Simandou fait que ces cabinets travaillent avec les autorités de la République de Guinée. Et le suivi et l'accompagne- ment pour la réalisation du projet minier Simandou, ont mobilisé plus près de 20 milliards de dollars.
Réalisée par Venance Kokora en collaboration avec Joël Dally