Le 29 janvier prochain, les trois pays de l'Alliance des États du Sahel (AES) ne seront officiellement plus membres de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Eux qui considèrent leur départ comme effectif et irréversible depuis déjà près d'un an, auront tout de même six mois supplémentaires pour poursuivre leur réflexion, à la demande du Sénégal, facilitateur de la CEDEAO pour tenter d'obtenir le retour de ces trois pays, et du Togo, pays de la CEDEAO le plus proche des régimes militaires de l'AES. Un délai qui sera surtout utile à la CEDEAO elle-même, qui n'a pas réagi dimanche à l'annonce inattendue, la veille, de l'AES : cette dernière offre la liberté de circulation en son sein aux ressortissants des pays de la CEDEAO. L'organisation sous-régionale pourrait-elle accorder la réciprocité aux citoyens maliens, nigériens et burkinabè ? Ce qui pourrait être perçu comme un moindre mal, voire une victoire, permettant d'éviter la « désintégration » de la Cédéao tant redoutée par le médiateur, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye, ou comme un aveu de faiblesse, concession de taille démontrant l'incapacité de la Cédéao à retenir ces trois pays. Pendant majeur à la libre circulation des personnes : la question des droits de douanes.
Les pays de la CEDEAO ont, à ce stade, choisi de ne pas choisir. L'option de la rupture avec les régimes de l'AES serait synonyme de Cédéao forte et cohérente avec ses principes, mais avec des conséquences potentiellement dommageables pour les populations concernées – le même dilemme que lorsque des sanctions avaient été imposées après les coups d'État dans ces trois pays – et pour l'avenir même de l'organisation.
À l'inverse, l'option d'une CEDEAO plus flexible serait également celle d'une CEDEAO « à la carte », résignée, qui permettrait aux régimes putschistes de conserver les avantages en se passant des « inconvénients » liés à la gouvernance démocratique. Ce qui créerait – et ce n'est pas un petit détail – un précédent risqué.
Ces six mois supplémentaires pourraient permettre aux pays ouest-africains d'harmoniser leurs positions, en fonction de possibles évolutions. « Face à un régime fragile comme le Burkina, pose un chercheur ouest-africain, à un Niger qui n'a toujours pas mis en place de transition, et à un Mali qui pourrait organiser des élections, la patience est peut-être la stratégie de la raison ».
RFI.fr