
Le fléau des Violences Basées sur le Genre (VBG) en Côte d'Ivoire demeure une priorité pour le gouvernement ivoirien. Le mardi 11 mars 2025, lors de la conférence de presse hebdomadaire "Tout Savoir Sur", organisée par le Centre d'Information et de Communication gouvernementale (CICG) à Abidjan-Plateau, Dr Namizata Fofana Binaté, conseillère technique genre chargée de la Coopération régionale au ministère de la Femme, de la famille et de l'enfant, a présenté un bilan de la lutte contre ce fléau.
Un bilan alarmant des cas de VBG en 2024
Selon Namizata Fofana Binaté, en 2024, 9607 cas de VBG ont été déclarés et pris en charge sur tout le territoire ivoirien en 2024. Parmi eux, on dénombre 920 cas de viols, 287 agressions sexuelles, 25 mutilations génitales féminines, 153 mariages forcés, 1798 cas de violences psychologiques et émotionnelles, 2030 agressions physiques et 4394 cas de déni de ressources.
Ces chiffres, quoiqu’officiels, sont loin de la réalité sur le terrain. D’ailleurs ces chiffres ne prennent pas en compte les nombreux cas de féminicides enregistrés ces derniers temps. Cependant, pour la conférencière, ces chiffres, bien qu'interpellants, traduisent aussi une meilleure prise en compte de ces violences, notamment grâce aux efforts de sensibilisation et aux dispositifs de prise en charge mis en place par le gouvernement et ses partenaires.
Un dispositif renforcé pour lutter contre les VBG
Face à cette situation, le gouvernement a mis en place plusieurs mécanismes de lutte et de prévention. Parmi eux, on compte 95 plateformes multisectorielles de lutte contre les VBG, qui permettent d'assurer une prise en charge efficace des victimes, une ligne verte (1308) pour signaler les violences et offrir une assistance immédiate aux victimes, des Centres de Protection de la Petite Enfance (CPPE) et des Centres d'Action Communautaire pour l'Enfance (CACE) pour accompagner les enfants victimes ou exposés aux violences, quatre centres d'accueil pour femmes et enfants victimes de VBG, dont le dernier est en phase d'achèvement, la construction de Bureaux Genre, où les survivantes de violences peuvent trouver refuge et assistance, des campagnes de sensibilisation, telles que "Carton Rouge aux VBG" et la célébration des "16 jours d'activisme contre les VBG". Par ailleurs, la conseillère technique a mis en exergue la nécessité d'une mobilisation collective pour renforcer ces dispositifs et garantir une meilleure protection des victimes.
Des avancées significatives en matière d'égalité des sexes
Outre la lutte contre les VBG, des progrès notables ont été enregistrés dans divers domaines visant à promouvoir l'égalité entre les sexes en Côte d'Ivoire. Premièrement au niveau de l'éducation, le pays fait face à la parité entre filles et garçons dans l'enseignement primaire est presque atteinte, une avancée remarquable par rapport aux années précédentes. Toutefois, des efforts restent à faire pour améliorer la rétention des filles dans l'enseignement secondaire et supérieur.
Au niveau de la santé, Dr Namizata Fofana Binaté se réjouit de l'accès aux soins de santé désormais amélioré grâce à l'implantation de centres de santé de proximité, permettant aux populations rurales de recevoir des soins adéquats. La prise en charge des femmes victimes de violences y est aussi intégrée. En outre, la participation politique des femmes en Côte d’Ivoire jugé plus importante se veut est la matérialisation de l’engagement des femmes à s’impliquer de plus en plus dans les tribunes de décisions. Depuis l'adoption de la loi instaurant un quota de 30 % de femmes dans les instances de décision en 2019, note la conférencière, la participation des femmes à la vie politique s'est améliorée. Même si ce pourcentage reste encore faible, il marque un début encourageant.
L'évolution du cadre légal pour une meilleure protection des femmes
Aussi, souligne la conseillère technique genre, le cadre juridique ivoirien a été adapté afin de renforcer les droits des femmes et lutter contre les discriminations. Parmi les avancées notables, on note la gestion commune des biens familiaux, la reconnaissance du statut de chef de famille pour les femmes, le droit pour une femme de conserver son nom après le mariage ou de transmettre son nom à ses enfants, la liberté pour une femme d'exercer le métier de son choix sans l'autorisation de son mari.
L'harmonisation des lois nationales avec les conventions internationales ratifiées par la Côte d'Ivoire reste un enjeu majeur. Par exemple, la loi sur le quota des femmes adoptée en 2019 a été suivie d'un décret d'application en 2020, illustrant la volonté du gouvernement d'assurer une mise en œuvre effective de ces réformes.
Les défis restants et perspectives d'avenir
Malgré ces avancées, plusieurs défis restent à relever pour une égalité réelle entre les sexes et une réduction significative des VBG en Côte d'Ivoire. C’est la raison pour laquelle Dr Namizata Fofana Binaté exhorte au renforcement de l'application effective des lois existantes. Pour elle, pour y arriver il faudrait multiplier les campagnes de sensibilisation pour changer les mentalités, augmenter les financements destinés aux programmes de lutte contre les VBG, poursuivre la formation des acteurs clés (policiers, magistrats, travailleurs sociaux), développer des mécanismes de suivi et d'évaluation plus efficaces.
Manuel Zako