Économie

Performances économiques/Un spécialiste en gestion de risques financiers rassure : « Le miracle de la croissance ivoirienne peut se poursuivre »

performances-economiques-un-specialiste-en-gestion-de-risques-financiers-rassure-le-miracle-de-la-croissance-ivoirienne-peut-se-poursuivre
Président du réseau pour les initiatives industrielles en Afrique, Banquier et expert en gestion des risques
PARTAGEZ
Le président Alassane Ouattara a déclaré le mardi 31 décembre 2024, lors de son adresse à la Nation, son ambition de porter en 2025, le taux de croissance de la Côte d’Ivoire à environ 7% contre 6,1% en 2024.

Le disant, le chef de l’État s’appuie sur une politique d’investissement orientée dans des secteurs stratégiques pour l’économie ivoirienne, notamment les infrastructures, l’énergie et l’agriculture.

Cette déclaration du président de la République n’a certainement pas laissé indifférents les investisseurs nationaux et étrangers, pour lesquels la Côte d’Ivoire aux côtés du Sénégal et dans une moindre mesure, le Bénin, reste l’une des destinations les plus prisées en termes d’investissements au niveau de la zone UEMOA.

Tout investisseur averti analyserait le caractère réalisable ou non, de ces déclarations de prévision de croissance pour la Côte d’Ivoire, au regard des facteurs clés ci-après : l’évolution du PIB par rapport à la dette publique du pays, les opportunités offertes par les secteurs clés pourvoyeurs de PIB, la confiance dans la notation crédit du pays, le poids du service de la dette et l'évolution des investissements étrangers et nationaux dans le pays.

À propos de la dette publique, en se basant sur les données disponibles, elle avait connu une progression significative entre 2021 et 2023, passant de 20150,62 milliards de FCFA en 2021 à 27645,98 milliards de FCFA en 2023. En pourcentage, en 2021, la dette publique de la Côte d'Ivoire s'élevait à 30,63 % du PIB, à 35,95 % du PIB en 2022 et en 2023, 37,17 % du PIB. Pour 2024, la dette publique de la Côte d’Ivoire était projetée par le Fonds Monétaire International à 37,43 % du PIB.

Des investissements massifs menés depuis plusieurs années par le gouvernement

Au regard des données macroéconomiques disponibles, la déclaration du président Ouattara constitue, en réalité, une simple confirmation de la politique de croissance via les investissements massifs déjà menés depuis plusieurs années par son gouvernement. En effet, l’évolution de l’endettement public de la Côte d’Ivoire est directement liée aux investissements colossaux dans les infrastructures, l’énergie et l’agriculture qui ont démarré depuis quelques années, en accord avec les objectifs de développement.

Toutefois, s’il n’y a rien de nouveau sous le ciel d’Abidjan par rapport à la politique de croissance déclinée par le premier des Ivoiriens, il est utile de s’attarder un tant soit peu sur l’appréciation du caractère réalisable des objectifs du gouvernement pour 2025. Pour ce faire, la méthode la plus indiquée reste de se tourner vers une analyse de la progression du PIB sur la même période, au regard de la progression de l’endettement. En effet, le succès de la politique de croissance du président Ouattara réside dans l’impact positif des investissements effectués par le levier de la dette sur la croissance économique. Dans ce cadre, l'évolution du PIB de la Côte d'Ivoire entre 2021 et 2024 montre une croissance significative, tant en valeur qu'en pourcentage. En 2021, le PIB de la Côte d'Ivoire était estimé à 44207,17 milliards de FCFA. En 2023, le PIB a atteint 49637,78 milliards de FCFA, marquant une augmentation notable et en 2024, les prévisions indiquent que le PIB devrait atteindre 52863,39 milliards de FCFA, selon les modèles macroéconomiques de Trading Economics.

Il faut donc noter que la croissance de la Côte d’Ivoire est soutenue par une augmentation moyenne annuelle du PIB d'environ 6 % à 7 % depuis 2021. Par conséquent, l’on peut, sans grand risque de se tromper, affirmer que le gouvernement joue la prudence en indiquant une croissance qui pourrait passer de 6% en 2024 à 7% environ en 2025.

C’est d’ailleurs, une attitude prudente à saluer, en cette période d’incertitude sur le plan économique au niveau mondial, marquée par le risque important d’une politique américaine de protectionnisme accrue avec le nouveau président américain élu, Donald Trump, les tensions envisageables entre le bloc BRICS et le camp occidental, l’impact de la guerre en Ukraine sur l’économie mondiale, notamment dans le domaine agricole, sans oublier les menaces potentielles sur l’arrimage de franc CFA à l’Euro, du fait de l’affaiblissement de l’économie française au sein de la zone EURO.

La croissance ivoirienne restera donc comme les années précédentes, principalement tirée par les secteurs agricoles (notamment le cacao qui représente 14 % du PIB), les investissements dans les infrastructures et le développement des secteurs secondaire et tertiaire. Les investissements publics et privés resteront donc au cœur de la politique de croissance du gouvernement.

Poursuivre la consolidation de la politique de croissance

En définitive, le gouvernement peut, pour 2025, espérer poursuivre, avec succès, la consolidation de sa politique de croissance par la dette, en tablant sur une progression du PIB de +7%, dans la mesure où la signature du pays continue d’inspirer confiance. En effet, la Côte d'Ivoire est notée par les agences de notation souveraine de manière convenable. Par exemple, Moody's a noté la dette souveraine de la Côte d'Ivoire à B3 avec une perspective stable. Une notation de crédit relativement solide, permettant au pays d'accéder aux marchés financiers internationaux à des taux d'intérêt abordables.

Au terme de notre analyse, il apparaît évident que le miracle de la croissance ivoirienne peut se poursuivre tant que le pays continue d’inspirer confiance aux bailleurs de fonds et aux investisseurs. Le principal challenge des responsables ivoiriens en 2025 et pour les années à venir, sera donc leur capacité à maintenir une stabilité politique et une paix sociale durable, afin que la Côte d’Ivoire continue de bénéficier d’une facilité d’endettement pour soutenir sa croissance par les grands travaux. Cependant, il faudra éviter le risque de la confiscation de la grande partie des retombées de cette croissance par les détenteurs importants de capitaux, qu’ils soient nationaux ou non. D’où, la nécessité de déployer des politiques efficaces de redistribution de la richesse créée, un aspect très important pour la consolidation de la paix sociale.

Ifede Prosper Alagbe

Newsletter
Inscrivez-vous à notre lettre d'information

Inscrivez-vous et recevez chaque jour via email, nos actuaités à ne pas manquer !

Veuillez activer le javascript sur cette page pour pouvoir valider le formulaire