
« Le président Laurent Gbagbo, quelle déception ! Et dire que j’étais l’un de ses supporters les plus zélés. Je pouvais le défendre jusqu’à l’absurde. Parce que je croyais en lui. Et je croyais en lui, parce que je pensais qu’il défendait des valeurs, qu’il avait des principes coulés dans le marbre. Je m’étais lourdement trompé. Je réalise, sur le tard, depuis son retour de la CPI, que je me suis gouré sur toute la ligne. Je découvre enfin l’homme tel qu’en lui-même. Puissant le jour, mais faible la nuit. Je m’explique. D’ailleurs, il l’a lui-même publiquement reconnu. Ce n’est pas un voleur. Mais, c’est un coureur de jupons. Or, tout coureur de jupons est un homme faible qui finit par périr là où il a péché. Laurent Gbagbo ne fait pas exception.
Après avoir subi la loi de Simone Ehivet avec qui il a dirigé ce pays en double commande, il est aujourd’hui, ou plutôt, pour coller à la vérité historique, voire factuelle, il s’est lui-même livré pieds et poings liés à sa nouvelle compagne qu’il appelle ‘’sa petite femme’’. J’ai de la peine à croire que j’ai cru en cet homme pendant de nombreuses années », s’est longuement épanché un ex-GOR déçu du nom de Jacob Ahondjon Frédéric. Que dire après cette tirade guidée par le bon sens autant que la réalité la plus apodictique ? Ainsi, plutôt que de rassembler sa famille politique aux fins d’en faire un formidable levier de son ambition politique résumée en deux mots, « reconquérir le pouvoir », il a préféré accentuer la fracture jusqu’au schisme intervenu officiellement le 17 octobre 2021, après qu’il a tourné le dos au FPI deux mois et une semaine, jour pour jour, plus tôt. Les Saintes écritures l’enseignent, « une maison divisée contre elle-même, est vouée à la perdition ». Cela vaut aussi pour les partis politiques. Le FPI ne fait pas exception.
Cela vaut aussi pour les partis politiques
En créant donc le Parti des peuples africains, section Côte d’Ivoire (PPA-CI), Laurent Gbagbo prenait, de facto, le risque de diviser sa base électorale au-delà de sa famille politique. Et comme de juste, cela ne fut pas sans conséquences, le 02 septembre 2023, lors des élections locales (Municipales et Régionales) qui ont vu ce nouveau parti faire chou blanc avec moins de 5 communes sur 201 possibles ! Autant parler de Bérézina. Et dire que les candidats PPA-CI ont battu campagne avec le nom Gbagbo qu’ils ont dû répéter comme un mantra. Mais, la magie n’opère plus.
Il y a certes quelques indécrottables qui refusent de regarder les choses en face et qui voient toujours l’ancien chef de l’État avec les yeux de Chimène. Mais, pour la grande majorité des Ivoiriens, Laurent Gbagbo est un homme « dépassé » et « du passé », un « has been » qui, tel un vieux cheval de retour, veut se refaire une nouvelle virginité politique, oubliant qu’il traine un lourd passif tel un boulet. Et pour masquer ses échecs passés, il embouche une antienne éculée baptisée « Trop, c’est trop » pour dénoncer la « vie chère », qui est un phénomène mondial, le chômage des jeunes, qui n’est pas une spécificité ivoirienne, la corruption qui était endémique sous son règne, et, last but not least, un supposé 4e mandat de son successeur. Mais de ce qu’il veut apporter aux Ivoiriens, il oublie de parler.
Il ressasse ad libitum que le pays est mal géré
Au contraire, il ressasse ad libitum que le pays est mal géré avec une « digba dette » en prime. Quelle blague ! Comme s’il n’avait jamais dirigé ce pays. Et pourtant, sa gouvernance marqua un net recul de la Côte d’Ivoire sur tous les plans avec une croissance négative là où celle-ci affiche désormais plus de 6%, nolens volens. Ce qui marque bien la différence entre lui et Ouattara, un homme dont il ose dénigrer la gouvernance. Mais, ce n’est pas le plus préoccupant. Parce que le plus ubuesque, c’est qu’à 80 ans bien sonnés, cet homme qui ne s’est jamais soucié que de sa petite personne et de sa gloriole, veut faire croire à ses compatriotes qu’il se bat pour la Côte d’Ivoire. Il multiplie donc les appels et les initiatives dans ce sens, alors que physiquement, il n’est plus que l’ombre de lui-même.
Comment ne pas revisiter ces vers du monologue de Don Diègue dans la célèbre œuvre « Le Cid » de Pierre Corneille ? ‘’ô rage ! ô désespoir ! ô vieillesse ennemie ! N’ai-je tant vécu que pour cette infamie ?’’. Laurent Gbagbo aurait pu faire siennes ces paroles. Parce qu’il vit une vraie infamie née de sa radiation de la liste électorale. Lui, le Woody de Mama, l’authentique « fils du pays » pourrait ne pas prendre part au scrutin présidentiel prévu le 25 octobre prochain. Il vit d’autant mal cette situation « dégradante » pour son égo qu’il s’est fait investir par son parti comme « candidat » à cette joute capitale. Et qu’il est en train de collectionner les parrainages pour valider sa candidature. Du grand n’importe quoi que seules peuvent justifier sa suffisance et son infatuité, lui le « dépositaire » de la Côte d’Ivoire moderne. Àla vérité, Laurent Gbagbo vit un drame personnel, fruit de l’idée (surfaite) qu’il se fait de lui-même, se croyant indispensable. Alors qu’il n’est qu’un mortel. Or, chacun le sait, nul n’est irremplaçable. Nul. Qui qu’il soit. Même Laurent Gbagbo.
Ambroise Tiétié