
Plus que jamais maître des Horloges, le président Alassane Ouattara a démontré, le dimanche 22 juin dernier, à l’ultime journée du 2e congrès ordinaire du RHDP, qui a eu pour cadre le stade olympique qui porte son nom, qu’il est un fin stratège. De fait, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’aussi bien l’opposition qui l’attendait de pieds fermes, que ses militants et sympathisants qui réclamaient, à qui mieux mieux, sa candidature en octobre prochain, ont été déroutés par sa réaction à la requête de ces derniers. « Concernant la candidature à la présidentielle du 25 octobre 2025, je veux vous redire que je suis le Président de tous les Ivoiriens, pas seulement des militants du RHDP.
Je veux donc vous dire aujourd’hui ceci : Je vous ai entendus, je vous ai compris. Je vous remercie de votre confiance. Je prendrai, dans les jours qui viennent, après mûre réflexion, en âme et conscience, une décision », a-t-il annoncé. S’il est vrai que le président du RHDP a voulu se donner encore le temps de la réflexion en laissant ouvertes toutes les options, il se trouve que pour le camp d’en face, la perception est toute autre. En effet, Damana Adia Pickass, cadre du PPA-CI, coordonnateur du mouvement « Trop, c’est trop », parle d’une « reculade », voire une « victoire politique ». Et les mots pour traduire sa satisfaction ont la violence de son constat. « Face à la mobilisation contre le quatrième mandat, le Président Ouattara vient de reculer », se réjouit-il bruyamment. Et pourtant, on peut le dire, ce n’est ni une reculade, ni une rebuffade. C’est plutôt de la « stratégie ». Tout simplement. Mais, les opposants, insensibles à toute finesse ou subtilité, ne peuvent y voir que ce qu’ils veulent. Tant pis.
Il laisse l’opposition en rade
Pour le reste, l’on notera que par cette annonce, Alassane Ouattara se donne non seulement une marge, mais il laisse l’opposition, qui s’attendait à une réponse claire, en rade. Et la renvoie à ses calculs de probabilité. Et pendant que les Damana et autres se gargarisent d’une présumée victoire, le chef de l’État peut réfléchir à plusieurs scénarii pour la suite. Dans cette dynamique, deux (2) options s’offrent au RHDP. Soit, le président du parti garde la main, conformément aux attentes de ses militants ; soit, il jette dans le bain, l’un des éléments de la « demi-douzaine de successeurs » putatifs dont il parlait naguère.
Dans un cas comme dans l’autre, le parti au pouvoir n’a pas de mauvais sang à se faire. Il domine trop, de la tête et des épaules, la scène politique pour craindre « qu’un autre parti sorte dans dos ». Puisque plus qu’une formation politique, la coalition houphouëtiste est devenue une véritable « machine électorale » qui écrase tous les prix depuis 2011, comme l’attestent les résultats des scrutins organisés depuis l’accession du parti au pouvoir d’État. Ce n’est pas un hasard si l’alliance présidentielle détient la majorité des élus dans les deux chambres du Parlement, mais aussi dans les Conseils régionaux et municipaux. C’est un fait apodictique.
Il est souhaitable sinon souhaité que Ouattara se porte à nouveau candidat
L’on voit donc mal comment un candidat RHDP à cette élection présidentielle pourrait être surclassé par un autre de l’opposition. C’est pourquoi, s’il est souhaitable sinon souhaité que le président Alassane Ouattara porte à nouveau les couleurs de ce parti à cette échéance, ce ne serait pas la fin du monde si le concerné en décidait autrement, pour une raison ou une autre. D’ailleurs, étant entendu que le seul qui peut empêcher, après le Tout-puissant, de qui tout procède et à qui tout retourne, Alassane Ouattara d’être candidat, puisque la Constitution l’autorise à candidater pour une seconde fois sous la 3e République, c’est Alassane Ouattara lui-même, en l’espèce, nul ne pourrait trouver à redire. Tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes et la messe serait dite. C’est aussi pourquoi, le choix fait par le chef de l’État de ne pas choisir ne devrait pas agacer ou inquiéter les militants, outre mesure. Parce que, sauf cataclysme, improbable, au demeurant, il n’y a pas le feu en la demeure : le RHDP est toujours en haut de l’affiche. Et quoi que puisse dire ou faire, l’opposition émiettée en autant de factions que de leaders potentiellement présidentiables, cette donnelà court peu de risques d’être changée avant longtemps. C’est de ça qu’il s’agit, in fine !
Ambroise Tiétié