
C’est le grand malaise dans la maison du “front commun”. Le mariage de raison entre le PPA-CI et le PDCI tourne à la dispute publique. Les militants, qui croyaient défendre une cause sacrée, découvrent avec stupeur qu’ils ont été envoyés au front sans boussole ni secours. Les réseaux sociaux des deux partis sont devenus de véritables champs de bataille, où les mots d’oiseaux remplacent les slogans révolutionnaires.
Tout est parti d’une série de trois communiqués qui ont fini d’achever le peu de cohérence qui restait à la coalition. Le premier, un brin diplomatique, laissait entendre une reconnaissance du scrutin par la remontée d'informations sur le déroulement du vote. Le deuxième, maladroitement rédigé, convoquait une réunion pour le mardi 28 octobre prochain. Et c’est là que la base s’est embrasée. Les militants, déjà frustrés par la tournure des événements, y ont vu une trahison pure et simple. “On nous a envoyés au charbon pour ça ?”, s’interroge un internaute visiblement déçu.

Pour tenter de calmer la tempête, un troisième communiqué a été publié à la hâte. Cette fois, les dirigeants exigent la reprise du scrutin. Trop tard. Le mal est fait. Les militants n’y croient plus. “Reprendre quoi ? Vous étiez où quand on nous pourchassait ?”, répond un autre militant furieux.
Ce désamour entre les états-majors et leur base traduit une vérité crue : le PPA-CI et le PDCI ont perdu la main, mais surtout la confiance de leurs propres troupes. À force de jouer avec les émotions des populations, de promettre des lendemains révolutionnaires qui ne viennent jamais, les stratèges du “front commun” récoltent aujourd’hui ce qu’ils ont semé : le désaveu et la désillusion.
Ironie du sort, ceux qui criaient à la “victoire populaire” se retrouvent désormais cernés par la colère populaire. Sur les pages officielles, les militants n’épargnent plus personne. Les “professeurs”, “anciens ministres” et autres “grands stratèges” sont moqués, traités d’“illusionnistes de salon”. On leur reproche d’avoir “fait de la politique avec des mots pendant que les autres faisaient l’histoire avec des actes”.
Le “front commun” ressemble désormais à un radeau en perdition, où chacun cherche une bouée pour sauver ce qui peut l’être. Pendant ce temps, le pays avance, serein, porté par une majorité qui a préféré les urnes à la rue. Les insurrectionnels, eux, ont tout perdu : la bataille, la crédibilité… et maintenant leurs propres militants.

Il fut un temps où le PPA-CI et le PDCI prétendaient incarner “le peuple”. Aujourd’hui, c’est ce même peuple qui leur tourne le dos. Moralité : à force de jouer les pyromanes, on finit toujours par se brûler.
Yacouba DOUMBIA