
L ’année écoulée fut difficile pour le football ivoirien sur la scène continentale. Sur les quatre clubs engagés, seuls l’ASEC Mimosas et le Stade d’Abidjan ont atteint la phase de groupes, sans pour autant briller. Le Racing Club d’Abidjan et le FC San Pedro ont calé dès les tours préliminaires, décevant de nombreux observateurs. Le cas du Stade d’Abidjan, en Ligue des champions de la Confédération Africaine de Football (CAF), reste symptomatique des limites actuelles du football ivoirien. Avec un effectif pourtant renforcé par des joueurs d’expérience comme Assalé Roger et Aka Essis, les Yéyés ont sombré dans une phase de poules ratée, notamment à cause de l’absence de leur entraîneur principal, Alexandre Laffite, non qualifié pour diriger l’équipe en compétition. Un impair administratif révélateur d’un manque de rigueur à ce niveau de compétition.
Des ambitions renouvelées à quel prix ?
Roméo Coulibaly, journaliste sportif et consultant sur Fréquence 2, met en garde : « L’ASEC Mimosas n’a plus le droit à l’erreur. Après un recrutement peu convaincant l’an dernier et une élimination frustrante, le club doit faire preuve de plus d’ambition et de cohérence dans sa politique sportive ». Même son de cloche pour le FC San Pedro, dont les incertitudes inquiètent. L’effectif devrait perdre des cadres tels que Constant Wayou et Gariba, et l’arrivée d’un nouveau coach, Hassen Bellil, le troisième en moins d’un an, traduit une instabilité chronique. Pour Coulibaly, « l’équipe doit retrouver une stabilité technique, se renforcer avec des joueurs de qualité et se préparer sérieusement.
Jouer sur deux tableaux exige une rigueur à tous les niveaux ». Nasser Eddy, consultant sportif pour la Nouvelle Chaîne Ivoirienne et Radio Nostalgie, pointe du doigt un mal plus profond. « Nos clubs abordent trop souvent ces compétitions avec un complexe d’infériorité. On l’a vu avec le Stade d’Abidjan, où certains joueurs, au lieu de se battre sur le terrain, allaient demander des maillots dans les vestiaires adverses. Ce comportement traduit une résignation mentale qui se paie cash ». Il appelle à un changement d’état d’esprit, une révolution mentale. « Même si les moyens sont moindres, c’est par la combativité et le caractère que nos clubs peuvent créer la surprise. Il faut croire en nos forces », conseille-t-il.
Au prix d’une meilleure préparation
Malgré les faiblesses structurelles, budget, infrastructures, formation, les deux analystes s’accordent sur un point. La Côte d’Ivoire peut espérer faire bonne figure, si elle corrige ses erreurs passées. L’ASEC, par son expérience, reste un pilier fiable. Le Stade d’Abidjan montre des signes de structuration. L’AFAD, jeune mais audacieuse, pourrait surprendre. Quant au FC San Pedro, il reste capable d’exploits ponctuels, à condition de trouver une stabilité. « L’objectif, ce n’est pas encore de gagner la Ligue des champions, mais au moins d’amener trois clubs en phase de poules. C’est possible si les dirigeants prennent enfin la pleine mesure des exigences du haut niveau », conclut Nasser Eddy.
Plus qu’une campagne continentale, cette saison 2025- 2026 représente un test grandeur nature pour le football ivoirien. Les performances des clubs auront un impact direct sur le classement CAF du pays et, à long terme, sur le nombre de représentants autorisés. Il est donc impératif de capitaliser sur les échecs passés pour bâtir un avenir plus solide. Avec plus de sérieux dans la préparation, une gestion administrative rigoureuse, des choix de recrutement intelligents et un état d’esprit conquérant, les clubs ivoiriens peuvent redevenir des acteurs majeurs du football africain. Mais cela passe d’abord par une prise de conscience collective.
Olivier YEO