
Le secteur de la pêche dans les pays membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) se révèle stratégique à plus d’un titre. Avec une production halieutique estimée à 1,5 million de tonnes depuis 2023, il assure l’approvisionnement alimentaire de plus de 105 millions de personnes et contribue à hauteur de 5 % au PIB de la zone. Pourtant, ce secteur vital est confronté à de multiples défis que la Commission de l’UEMOA s’efforce de surmonter.
Diegane Dong, Directeur des ressources animales et halieutiques à la Commission de l’UEMOA, souligne l’importance du secteur dans l’espace communautaire. Cinq pays côtiers et trois pays enclavés mais dotés de cours d’eau majeurs constituent un vivier halieutique remarquable. La consommation moyenne de poisson est de 12,4 kg par habitant par an, un chiffre supérieur à la moyenne africaine (9 kg), bien qu’inférieur à la moyenne mondiale (21,3 kg). Outre son rôle alimentaire, le secteur représente 5 % des emplois dans l’Union. Pourtant, la pêche souffre de nombreuses difficultés : pêche illicite, mauvaise gouvernance des ressources, manque d’infrastructures, faible transformation locale et surexploitation des stocks.
Mise en place de plusieurs instruments pour pallier les difficultés
Face à ces menaces, la Commission de l’UEMOA a mis en place plusieurs instruments. Un comité régional de concertation sur la pêche réunit depuis 2004, gestionnaires, chercheurs et professionnels pour harmoniser les politiques et élaborer des mesures concrètes. Deux directives clés ont été adoptées en 2014, l’une sur la surveillance des pêches et l’autre sur la gestion durable des ressources. À cela, s’ajoutent des textes complémentaires harmonisant l’accès aux ressources et l’exploitation. La Commission a également financé le projet régional de développement des stocks halieutiques (PRECH), incluant des pays tiers comme la Mauritanie et le Ghana, pour identifier les ressources partagées et améliorer leur gestion. Des systèmes de collecte de données ont été mis en place pour suivre l’état des stocks et définir les mesures de gestion appropriées (repos biologiques, gel de licences…).
Avec le plan stratégique Impact 2030, l’UEMOA change de paradigme. Le secteur de la pêche est intégré dans une logique de chaîne de valeur au sein de l’écosystème “protéines animales”, aux côtés des filières viande et aquaculture. L’objectif est d’impliquer tous les acteurs, y compris le secteur privé, dans la modernisation du secteur. Cette nouvelle approche s’accompagne d’actions transversales dans les domaines du transport, de l’énergie et du développement du capital humain. L’enjeu est clair renforcer la compétitivité, assurer la durabilité des ressources et faire de la pêche, un levier de transformation économique et sociale dans la sous-région. Le secteur de la pêche dans l’espace UEMOA détient un potentiel considérable, mais sa durabilité exige des efforts coordonnés, une gouvernance renforcée et des investissements ciblés. À l’horizon 2030, les perspectives sont prometteuses, à condition de maintenir le cap des réformes engagées et de mobiliser tous les acteurs pour une pêche responsable et compétitive.