
Le premier rôle a été joué par le Général Tiani qui a financé de main de maître cette opération. Selon les sources sécuritaires, le lieutenant-colonel Pascal Tigri, meneur des militaires béninois impliqués dans le complot, a reçu plusieurs transferts d’argent par voie terrestre et dépôt bancaire, de la part du Général Abdourahamane Tiani, chef d’État du Niger. Cette méthode de remise des fonds a été choisie afin d’éviter la traçabilité par le circuit bancaire. Le premier, d’environ 100 millions F CFA, aurait servi à structurer les premières opérations du coup d’État et à financer le déploiement des militaires recrutés. Le deuxième montant de 400 millions F CFA a servi au lancement de l’assaut. Tigri devrait recevoir 5 milliards F CFA s’il arrivait à débarquer le président Patrice Talon du pouvoir par la force des armes. Tous ces transferts d’argent et moyens de communication ont été détectés par les services de renseignement. Cet ensemble d’indices démontre un financement extérieur structuré, un commandement clair et une stratégie cohérente intégrée à une vision régionale.
L’entrée en scène de l’activiste Kemi Seba et Ibrahim Maïga
Kemi Seba, de son vrai nom, Stellio Gilles Robert Capo Chichi, était en communication régulière depuis plusieurs semaines avec le Général Abdourahamane Tiani par le biais d’un numéro de téléphone non identifié en son nom. Il avait activé une cohorte de cyber-activistes, dont lui-même. Ces derniers annonçaient le déluge au Bénin, sans toutefois préciser les contours. Alors que la situation politique et sociale ne présentait aucune fragilité particulière, puis que Patrice Talon avait déjà présenté son dauphin politique pour la prochaine présidentielle. Le Burkinabé, Ibrahim Maïga était pendant ce temps, en parfaite collaboration avec des mercenaires nigériens et burkinabè déjà présents au Bénin pour préparer leur coup. Kemi Seba et Ibrahim Maïga ont servi de relais entre l’AES et les militaires béninois qui préparaient l’opération. Ils avaient aussi pour rôle de mener une campagne sur les réseaux sociaux. Et ce, afin que les Béninois acceptent l’arrivées de mutin au pouvoir au lieu, d’une élection présidentielle qui installait un civil.
Le Burkina Faso, deuxième acteur clé
Le Burkina Faso s’était engagé à renforcer la propagande sur Facebook, Tik Tok et YouTube à travers ses cyber-activistes. Des influenceurs francophones et anglophones étaient chargés de produire des images, des vidéos manipulées et des faux communiqués pour tromper la vigilance de la population. Leur objectif était d’imposer la perception d’un pouvoir renversé et empêcher la mobilisation populaire contre les mutins.
Le samedi 6 décembre 2025, contre toute attente, le Niger a ouvert ses frontières terrestres avec le Bénin après un long temps de fermeture. Cette initiative aurait facilitée le transport des armes qui devraient servir au coup d’État. L’arrestation de plusieurs ressortissants burkinabè démontre, que l’opération a été préparée puis et exécutée avec la complicité de l’AES.
Lorsque l’opération a échoué, la propagande sahélienne s’est mise en branle. Des influenceurs proches des juntes du Mali, du Niger et du Burkina Faso ont diffusé un flot continu de rumeurs, de faux communiqués et de vidéos affirmant que le président Talon avait fui, que l’armée avait rallié les mutins ou que les institutions étaient tombées. L’un des idéologues proches du pouvoir burkinabè, Koné Gbagbo, déjà auteur de la fausse alerte d’un coup d’État au Bénin le 16 janvier 2025, a publiquement expliqué que "les mutins auraient dû pousser les populations dans la rue pour empêcher l’intervention de l’aviation nigériane venue en soutien à Cotonou". La vie de citoyens béninois devenait, dans cette analyse, un simple levier tactique. Ibrahim Maïga a publiquement salué la tentative de coup d’État.
Au moment de l’opération, l’armée béninoise a tenu jusqu'au bout. Le commandant de la Garde républicaine, Dieudonné Djimon Tévoédjrè, raconte comment, à 2 h 10, deux généraux de l’armée républicaine ont été attaqués simultanément à leur domicile. À 5 h, la résidence présidentielle était prise pour cible. La riposte rapide a mis en déroute les mutins, pris de court. Après cet échec, les auteurs de la tentative de coup d’État ont cherché à obtenir un appui aérien auprès d’un pays voisin du Bénin afin de renverser le rapport de force. Cette démarche a été mise au jour grâce à l’interception d’une conversation téléphonique, qui a confirmé l’ampleur et la gravité du complot. Informés de la situation, les partenaires et alliés du régime béninois ont rapidement décidé d’apporter leur soutien aux autorités légales. Cette mobilisation a permis une riposte coordonnée et efficace, conduisant à la neutralisation rapide des mutins. Un élément continue de susciter des interrogations. Le silence du Togo, où Pascal Tigri s’est réfugié après l’échec du coup. Plus de cinq jours après les événements, Lomé n’avait toujours pas réagi. Selon les informations d’Ouest-Afrik, Tigri y bénéficierait même d’une protection discrète. L’enquête en cours devra faire la lumière sur une éventuelle complicité du Togo dans l’affaire.
Bema Bakayoko