
Faut-il s’en étonner ? Non. Faut-il s’en indigner ? Assurément. Car la Constitution de 2016, loin d’avoir apaisé la scène politique, a été le ferment de contestations, d’exclusions et de fractures. Elle a offert des verrous juridiques aux allures de cadenas sélectifs, utilisés tour à tour pour écarter, retarder ou remodeler le jeu démocratique à la convenance des puissants.
Aujourd’hui, voir son rédacteur principal battre campagne pour celui qui en fut le premier bénéficiaire n’a rien d’une surprise : c’est l’illustration parfaite du mariage entre le droit et la politique d’intérêt. Le juriste, censé être gardien des principes, se mue en acteur d’un théâtre où les règles se plient aux volontés du prince.
La Côte d’Ivoire méritait mieux qu’une Constitution taillée pour des échéances électorales successives et pour des ambitions personnelles. Elle méritait une charte fondamentale qui transcende les hommes et survive aux régimes. Mais lorsque le concepteur de cette architecture choisit le terrain partisan, il confirme ce que beaucoup soupçonnaient : que cette Constitution n’a jamais été une forteresse de démocratie, mais une citadelle aux portes sélectives.
Hermann Aboa