
Loin des laboratoires aseptisés occidentaux, cette innovation est née d’une plante bien connue des foyers ivoiriens : le manioc, ou plus précisément ses feuilles, longtemps cantonnées à l’usage culinaire. Aujourd’hui, elles pourraient bien devenir l’allié santé de milliers de femmes, en Côte d’Ivoire et au-delà.
La ménopause est un tournant biologique inévitable pour toutes les femmes. Mais pour beaucoup, c’est aussi un parcours semé d’inconforts : bouffées de chaleur, insomnies, fatigue, fragilité osseuse. Des troubles souvent banalisés ou passés sous silence, malgré leur impact sur la qualité de vie. Face à l’inaccessibilité des traitements hormonaux classiques, coûteux et parfois controversés, l’option naturelle prend tout son sens. Et c’est justement ce que propose le projet de la Dre Kouamé : un produit issu de la pharmacopée ivoirienne, validé scientifiquement, pour accompagner les femmes à cette étape de leur vie.
« Ce projet, c’est aussi une manière de redonner de la valeur à nos savoirs locaux, tout en répondant à un besoin réel de santé publique », explique un membre de l’équipe. Porté par une scientifique, financé à hauteur de 15 millions de FCFA par le Centre Africain d’Études Technologiques (ACTS) via le FONSTI, ce projet est d’abord une victoire pour la recherche féminine.
Et ce n’est pas un hasard si cette dimension a été soulignée lors de la cérémonie de clôture tenue à l’UNA le 24 septembre dernier. « Une recherche par les femmes et pour les femmes », a salué Professeure Yoboué Véronique, Présidente de l’Université, mettant en lumière la place encore trop discrète des femmes dans les sciences.
Dans l’assistance, de nombreux enseignants-chercheurs, étudiants et représentants institutionnels ont salué la qualité du travail, mais aussi le modèle que représente cette initiative pour les jeunes chercheuses ivoiriennes. Le complément alimentaire formulé à partir des feuilles de manioc a démontré des effets positifs sur les troubles liés à la ménopause. Mais ce n’est pas tout. Le projet a aussi permis : La production de données scientifiques inédites sur les propriétés phyto-estrogéniques du manioc ; La promotion académique de plusieurs jeunes chercheurs ; Le lancement d’un processus de brevetage, gage de valorisation économique future.
L’équipe espère désormais obtenir des financements supplémentaires pour lancer des études cliniques à plus grande échelle, et ainsi inscrire ce produit dans une logique de commercialisation raisonnée, accessible à toutes.
Ce projet illustre une tendance de fond : le retour à une médecine intégrative, à la croisée des savoirs traditionnels et de la rigueur scientifique. Une médecine plus humaine, moins dépendante de l’importation de solutions extérieures, et surtout, plus adaptée aux réalités locales.
Le FONSTI, qui multiplie les appels à projets dans cette direction, voit dans cette réussite un exemple à suivre.« Ce type de recherche participe à la souveraineté sanitaire de notre pays », a déclaré le Professeur Kra Enoc, représentant de l’institution. « Il est essentiel de continuer à soutenir ces initiatives porteuses d’impact social et économique. », a laissé entendre.
À travers cette innovation, c’est tout un écosystème qui se met en mouvement par des scientifiques ivoiriens qui valorisent les plantes de leur terroir, des chercheuses qui inspirent, et des solutions de santé qui parlent le langage des populations.
A travers la Dre KOUAME et son équipe n’en sont qu’au début, mais leur message est clair : la science peut (et doit) être un levier d’émancipation, surtout pour les femmes.