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Opinion

Le Président, le Député et la Nation Ivoirienne : les enjeux d’une collaboration politique

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- Dr Kanaté Dahouda Soumahoro, Professeur Titulaire d’Université aux États-Unis. - Dr Oussou Kouamé Rémi est enseignant-chercheur en sociologie et anthropologie à l’Université Alassane Ouattara de Bouaké.

« Sur proposition de la Commission électorale indépendante, le Président de la République a signé un décret portant convocation des collèges électoraux pour l’élection des députés à l’Assemblée nationale à la date du samedi 27 décembre 2025 ». Ainsi s’exprimait Monsieur Ibrahime Coulibaly-Kuibiert, Président de la Commission électorale indépendante, lors d’une réunion d’information réunissant les partis et groupements politiques, ainsi que les potentiels candidats à cette élection. Les législatives ivoiriennes en question sont l’occasion de désigner les 255 prochains députés qui auront à siéger à l’Assemblée nationale pour un mandat de 5 ans. À la faveur de ces élections, le rôle du député de la nation s’impose à nouveau au centre du débat public. Dans l’euphorie des campagnes législatives en cours, beaucoup de confusions entourent la mission du député. Aussi n’est-il pas inutile de s’interroger sur sa véritable fonction : Est-il seulement chargé de voter les lois ? Constitue-t-il un acteur clé de la gouvernance et du développement du pays ? En somme, que peut-il concrètement accomplir pour la population qui l’a mandaté à l’hémicycle ? 

Au nom de la Cellule de réflexion et d’écriture militante, Dr Kanaté Dahouda Soumahoro et Dr Kouamé Rémi Oussou répondent avec pragmatisme à ces questions dans une réflexion intellectuelle débarrassée des jargons juridiques, afin d’enrichir de façon simple et claire le débat sur la nature de la collaboration stratégique entre le Président et le député au sein de l’Assemblée nationale. Le présent article s’inscrit donc dans un cadre de réflexion destiné à promouvoir une collaboration efficiente entre deux institutions majeures de la République, à savoir l’Exécutif et le Législatif. La Cellule de Réflexion et d’Écriture Militante réunit en son sein d’éminents intellectuels ivoiriens et africains engagés dans l’analyse des grands enjeux contemporains. Véritable laboratoire d’idées, elle élabore et diffuse des réflexions sur des questions politiques, socio-économiques et culturelles, dans l’objectif d’éclairer les décideurs et d’influencer l’opinion publique. Elle est placée sous la coordination générale du Dr Moustapha Ben Ismaïla Diaby. 

Dans toute démocratie moderne, la gouvernance d’un pays repose sur une collaboration harmonieuse entre les différentes institutions de l’État. Si le Président de la République incarne l’unité nationale et définit les grandes orientations politiques, le député de la Nation joue un rôle fondamental dans la mise en œuvre concrète de cette vision. Élu du peuple, acteur législatif et contrôleur de l’action gouvernementale, le député est un partenaire incontournable du Président dans la gestion et le développement du pays. Car, une fois élu, le député représente l’ensemble de la Nation et non simplement sa circonscription électorale.

Le député, le peuple et le pouvoir exécutif

Le député de la Nation tire sa légitimité du suffrage populaire. Il est le porte-voix des citoyens qu’il représente et fait remonter leurs préoccupations, leurs attentes et leurs aspirations au plus haut niveau de l’État. Il doit agir en tant que porte-parole des électeurs auprès du gouvernement et défendre les intérêts de ceux et celles qu’il représente à l’Assemblée nationale. À travers ses interventions au Parlement, ses questions au gouvernement et ses propositions critiques, il éclaire le Président de la République sur les réalités sociales, économiques et culturelles du pays. Cette proximité avec le terrain permet au Chef de l’État d’adapter ses politiques publiques aux besoins réels de la population, renforçant ainsi la pertinence et l’efficacité de la gouvernance. Pour réussir sa mission, le député ne doit pas se complaire dans la politique de la confrontation stérile ; il doit plutôt cultiver et maîtriser l’art de la conciliation afin d’apporter des solutions aux problèmes de gouvernance, en scrutant à la loupe la façon dont le gouvernement use du pouvoir qu’il exerce au nom des Ivoiriens.

Un acteur clé de l’élaboration des lois au service de la Nation

Le Président de la République, Incarnation de l’Exécutif, ne peut gouverner seul. La réalisation de son programme politique nécessite un cadre juridique solide, élaboré et adopté par le Parlement. Le député de la majorité présidentielle et le député de l’opposition sont censés travailler en synergie afin de contribuer activement à la rédaction, à l’examen critique des lois, ainsi qu’à leur adoption, dans la perspective de transformer la vision présidentielle en actions concrètes au service de l’intérêt général. 

En enrichissant les projets de loi par des débats constructifs et des amendements pertinents, ils améliorent la qualité des textes législatifs. Dans une République saine, tout député conscient qu’il exerce un mandat national au service du bien commun, doit travailler avec ses pairs pour aider le Président à doter le pays de lois justes, efficaces et adaptées aux défis contemporains qui orientent la marche de la nation dans la bonne direction : vers un avenir prospère et durable

Le contrôle parlementaire : un levier pour une gouvernance responsable

Le contrôle de l’action gouvernementale constitue l’une des missions essentielles du député. Loin de remettre en cause l’autorité présidentielle, ce rôle renforce la qualité de la gouvernance en favorisant la transparence, la responsabilité et l’efficacité de l’État. À travers les questions aux ministres, l’évaluation critique des politiques publiques et la participation aux commissions d’enquête, le Parlement contribue à améliorer la gestion des affaires publiques et à corriger les insuffisances constatées. Au sein de l’Assemblée nationale, les députés de la majorité présidentielle soutiennent l’action du gouvernement et œuvrent à l’adoption des projets de loi conformes au programme du Président de la République. À l’inverse, les députés de l’opposition exercent une fonction critique en surveillant l’action gouvernementale, en proposant des amendements ou des alternatives, et en déposant, le cas échéant, des motions de contestation. Mais toujours dans l’intérêt supérieur de la Nation.

Malgré les différences de positionnement idéologiques, tous les députés partagent des responsabilités communes. Ils représentent les citoyens de leur circonscription, assument un rôle d’écoute et de relai des préoccupations des citoyens de sa circonscription, participent aux débats parlementaires et contribuent à l’élaboration des lois qui façonnent le destin institutionnel de la République. Ainsi, majorité et opposition se rejoignent sur des objectifs d’intérêt général, notamment le contrôle de l’action publique, l’amélioration de la législation et la défense des principes démocratiques pour le bien-être des citoyens au nom desquels ils incarnent la souveraineté nationale.

Le député, le vote du budget et le développement national 

Le développement d’un pays repose en grande partie sur une gestion rigoureuse des ressources financières. Le député examine, débat et vote le budget de l’État, qui constitue l’instrument principal de mise en œuvre de la politique présidentielle. 

En veillant à une répartition équitable et stratégique des ressources, il permet au Président de financer les secteurs prioritaires tels que l’éducation, la santé, les infrastructures, l’agriculture et la sécurité. Par son expertise et sa vigilance, le député garantit aussi que les fonds publics servent effectivement le développement durable et le bien-être collectif.

Un facteur de stabilité politique et institutionnelle

La stabilité politique est indispensable à toute ambition de développement. Le député de la Nation, par son sens du dialogue, son respect des institutions et son attachement à l’intérêt général, contribue à préserver un climat politique apaisé. 

En soutenant les réformes nécessaires et en privilégiant la concertation, il aide le Président de la République à gouverner dans un cadre institutionnel stable, propice aux investissements, à la croissance économique et à la cohésion sociale.

Conclusion

En définitive, le député de la Nation est bien plus qu’un simple législateur. Il est un allié stratégique du Président de la République, un médiateur entre le peuple et le pouvoir exécutif, et un acteur central de la gouvernance démocratique. Par ses missions législatives, son rôle de contrôle, sa participation à l’élaboration du budget et son engagement pour la stabilité institutionnelle, il contribue efficacement à la gestion et au développement du pays. La collaboration sincère et responsable entre le Président et les députés constitue ainsi l’un des fondements essentiels d’un État fort, juste et tourné vers l’avenir.

Les Auteurs :

Dr Kanaté Dahouda Soumahoro est Professeur Titulaire d’Université aux États-Unis. Auteur de plusieurs publications sur des sujets aussi variés que la mémoire, l’exil, l’Américanité, la diaspora, la gouvernance et les enjeux politiques en Afrique et en Côte d’Ivoire, il est également Directeur scientifique de l’ouvrage collectif « Alassane Ouattara, l’artisan du renouveau ivoirien », et membre du Comité scientifique de la Cellule de Réflexion et d'Écriture Militante.

Dr Oussou Kouamé Rémi est enseignant-chercheur en sociologie et anthropologie à l’Université Alassane Ouattara de Bouaké. Expert en développement professionnel et employabilité étudiante, il est auteur de plusieurs ouvrages sur le développement, la gouvernance et la jeunesse en Afrique. Membre de la Cellule de réflexion et d’écriture militante, il co-auteur de l’ouvrage collectif « Alassane Ouattara, l’artisan du renouveau Ivoirien » ; il est activement engagé dans la vie citoyenne et la promotion d’une gouvernance responsable en Côte d’Ivoire.