
Comme il fallait s’y attendre, dans les heures qui ont suivi, il y a eu une avalanche de réactions au niveau de son parti politique qui a enchaîné les communiqués pour se désolidariser de cette candidature et le déchoir de ses responsabilités au sein du parti. Bien avant, certains cadres qui l’avaient soutenu dans son projet de « candidature de précaution », ont été également remerciés. Après l’annonce de la candidature du « missi dominici » du Kremlin en Afrique, des cadres ont également annoncé leur démission du Parti. Le décor ainsi planté, l’on peut dire que le désormais candidat à l’élection présidentielle du 25 octobre 2025 surfe sur des vagues plus ou moins favorables. Du moins, pour le moment. Mais ce n’est qu’une illusion.
À la vérité, le plus dur commence pour l’ancien patron du BNETD. Connaissant les pratiques au sein du PPA-CI, Ahoua Don Mello sera brocardé, ostracisé, dénigré et surtout, combattu. Étant un technicien chevronné et donc habitué à la rédaction de scénarios en matière de prospective, Don Mello a certainement déjà travaillé sur les scénarii qui l’attendent. Mais à vrai dire, l’homme s’est engagé dans ce qu’il convient d’appeler le suicide du scorpion. Dans les études prospectives, c’est un scénario qui décrit une situation dans laquelle un acteur, confronté à une équation quasiment insurmontable, fait un choix dont il connaît les conséquences, plutôt que l’adaptation. Don Mello savait qu’en annonçant sa candidature, il s’expose et expose aussi ceux qui le soutiennent dans son projet à la furia de ceux qu’il est convenu d’appeler les « Gbagbo ou Rien » (GOR). Et cela ne fait que commencer. Au sein du PPA-CI, d’aucuns disent que Laurent Gbagbo est pris en otage par un quarteron de cadres, avec en première ligne, son épouse Nady Bamba.
Qu’à cela ne tienne. En s’engageant dans cette voie, l’ancien patron du BNETD savait que cette candidature ne serait pas une balade de santé. Indépendamment du manque de soutien de son parti qui devient de facto son premier adversaire, Don Mello devra affronter aussi les contingences en externe. Aujourd’hui, après cette déclaration de candidature, il cherchera à rallier à sa cause, tous les frustrés du système Gbagbo comme Simone Gbagbo, son frère Affi N’guessan, Charles Blé Goudé, la branche dissidente du FPI, dirigée par Issiaka Sangaré, etc. Mais quel que soit le cas de figure ou quelles que soient les alliances ou les coalitions qui se feront autour de Don Mello, l’homme de la candidature de précaution, devenue une candidature de substitution, aura du fil à retordre. L’on sait tous que le scénario le plus redouté par toute l’opposition, c’est la candidature d’Alassane Ouattara. C’est pourquoi, depuis quasiment six mois, l’axe de communication et le projet de l’opposition, c’est d’empêcher la candidature de Ouattara.
Malheureusement pour cette opposition, Ouattara a répondu à l’appel du devoir et sera donc candidat à la présidentielle. Dans un tel contexte, l’opposition, même réunie et soudée autour d’un seul candidat, ne pourrait pas tenir face à la vague déferlante de la candidature de Ouattara. C’est dans ce contexte qu’intervient la candidature de Don Mello au sein d’une famille désunie et déchirée par des dissensions internes. Là où tous les partis réunis ne pouvaient rien faire, que pourra un individu qui n’a pas l’onction de sa famille politique ? Voici ainsi résumé le contexte dans lequel intervient la candidature de l’ex-vice-président du PPA-CI. Si la partie n’est pas perdu d’avance, ce n’est pas loin de l’être et le désormais candidat connaît bien cette éventualité. Pour le moment, l’homme a pris ses responsabilités et assumera les conséquences de ses choix, mais sa candidature a eu le mérite d’ouvrir le débat sur la gestion de nos partis. Là où l’idolâtrie est en train d’être érigée en règle dans sa famille politique, Ahoua Don Mello a eu le mérite d’ouvrir le débat sur les risques du sectarisme, du jusqu’au-boutisme et de la politique de la chaise vide. Il est dans les starting-blocks, mais son parcours sera parsemé d’embûches.
Bernard KRA