
Ce dénouement met un terme aux accusations qu’il lançait contre la justice ivoirienne, qu’il accusait d’être aux ordres et de lui dénier sa nationalité. En réalité, c’est la loi qui a parlé, et c’est en se conformant à ses exigences que Thiam a obtenu le précieux document.
Tout commence en juin 2020. Tidjane Thiam se fait délivrer un certificat de nationalité sur la base de son extrait d’acte de naissance et d’une copie incomplète du passeport de sa mère. Deux ans plus tard, en juin 2022, alors qu'il a caché le premier certificat de nationalité, un second lui est accordé grâce à la magnanimité du président de la République (il ne remplissait pas les conditions prévues par la loi). Mais en interne, au sein même du PDCI, on découvre qu'il s’est naturalisé français depuis le 24 février 1987.
Cette découverte le met en difficulté lors du contentieux électoral du mois d'avril 2025. Des militants du PDCI dénoncent son inscription sur la liste électorale alors qu’il avait encore la nationalité française, en violation de l’article 48 du code de la nationalité ivoirienne.
Le juge tranche, Thiam manœuvre
Face aux preuves (décret de naturalisation et décret de fin d’allégeance à la France daté du 19 mars 2025), le juge ordonne la radiation de Thiam de la liste électorale. Mais loin d’assumer, le président du PDCI tente une manœuvre : introduire, en pleine procédure de demande de sa radiation, une demande de certificat de nationalité avec les mêmes pièces déjà contestées.
La justice réagit avec fermeté : elle suspend la délivrance du document, le temps de statuer. Il n'en fallait pas plus pour que Tidjane Thiam crie à l'injustice. Dans le même élan, le ministre de la Justice publie une circulaire rappelant clairement les conditions légales de délivrance d'un certificat de nationalité ivoirienne : fournir un extrait d’acte de naissance et une copie d’une pièce d’identité de l’un des parents.
Pour clore le débat, Thiam finit par produire la copie de la pièce d’identité de sa mère datant de 1971 délivré à Tiassalé, son acte de naissance et surtout son décret de renonciation à la nationalité française, comme cela lui avait été demandé. Selon une source proche de la famille, ce document aurait été fourni par la veuve de son frère aîné, feu Daouda Thiam, avec qui les relations séraient distendues. Un geste décisif qui aurait permis à Thiam d'avoir la copie de la pièce d'identité de sa mère et à la justice de délivrer, enfin, un certificat de nationalité incontestable.
La leçon républicaine
La justice ivoirienne a toujours dit que Tidjane Thiam était Ivoirien et qu'il n'avait pas besoin d'un décret de réintégration à la nationalité ivoirienne. Elle lui a signifié que pour recouvrer la nationalité ivoirienne, il lui fallut envoyer son extrait d'acte de naissance, la copie de la pièce d'identité de l'un de ses géniteurs auxquelles il fallait joindre son décret de fin d'allégeance à l'Etat français du 19 mars 2025. Ce qu'il a finalement fait.
Ce feuilleton met en lumière une vérité simple : d'un, Thiam aurait pu produire le décret de naturalisation de son père pour éviter toutes ces difficultés. Sans doute par calcul, il voulait prouver qu'il a un parent d'origine ivoirienne. De deux, la justice n’est pas aux ordres, comme le clame Thiam, mais garante du respect des lois. Habitué aux privilèges, biberonné depuis son enfance au point de penser que le président Alassane Ouattara lui offrirait le pouvoir, il doit apprendre à respecter les règles. C’est en se pliant aux règles qu’il a obtenu gain de cause, et non par passe-droit. Tidjane Thiam, qui aspire à diriger la République, devrait retenir une leçon : en démocratie, le respect de la loi n’est pas une option, mais une exigence. Ses partisans doivent se réjouir et féliciter la justice.
Yacouba DOUMBIA