
Depuis plusieurs semaines, les réseaux sociaux ivoiriens sont saturés de messages inhabituels : non pas des annonces d’enfants disparus, mais plutôt celles d’enfants retrouvés, dont on ignore l’identité ou les parents. Une situation qui inquiète autant qu’elle sou[1]lève des interrogations sur la vigilance des familles et le rôle des structures de protection.
Des cas qui se multiplient
Parmi les plus récents, celui de Coulibaly Ousmane, élève en classe de CE2 à l’EPP Centre 1 de Gohitafla. Âgé de 9 ans, l’enfant a été conduit d’urgence au CHU de Cocody, le 27 août 2025 après un accident de la circulation. Pris en charge par le service de chirurgie pédiatrique, il se trouve désormais sous la responsabilité de la Bri[1]gade de Protection des Mineurs (BPM), structure rattachée à la Sous-Direction de la Lutte contre le Trafic, l’Exploitation d’Enfants et la Délinquance Juvénile.
Jusqu’ici, ses parents restent introuvables. À Adjamé, un autre enfant, âgé d’environ 5 ans, a été retrouvé, errant dans les rues. Il ne parle pas et n’a pu donner aucune indication sur son identité. À la même période, la BPM a annoncé avoir recueilli une fillette, Yao Adjoua Micheline, dont les parents ont été identifiés comme Yao Adama et Anna. Mais là encore, la petite attend toujours d’être remise à ses proches.
Une tendance préoccupante
Ces situations ne sont pas isolées. La BPM publie presque chaque semaine, de nouveaux avis d’enfants retrouvés. Les images de mineurs hébétés, perdus ou hospitalisés, circulent massivement sur les réseaux sociaux, accompagnées d’appels à témoin. La tendance inquiète d’autant plus qu’elle intervient dans un contexte marqué par de fréquentes alertes concernant des disparitions d’enfants, parfois associées à des rumeurs d’enlèvements. Désormais, ce sont les autorités qui cherchent les parents, et non l’inverse.
Ce renversement interroge. Comment expliquer qu’un enfant puisse se retrouver seul, accidenté ou abandonné, sans qu’aucun proche ne se signale ? Quels sont les mécanismes de suivi et de vigilance mis en place par les familles et les communautés ? Plusieurs pistes sont évoquées par les acteurs sociaux. Certains cas relèvent de la négligence parentale, liée au manque d’attention ou à des habitudes de laisser les enfants circuler seuls, même en bas âge. D’autres traduisent la vulnérabilité sociale : familles en situation précaire, enfants placés chez des tiers ou encore cas de fugues liés à des violences domestiques. Pour les associations de protection de l’enfance, il y a urgence à renforcer la sensibilisation.
La BPM en première ligne
La Brigade de Protection des Mineurs fait face à une recrudescence de cas, mobilisant ses agents pour recueillir, protéger et parfois soigner ces enfants. Mais ses appels récurrents montrent aussi les limites de ses moyens. L’implication citoyenne, notamment via les réseaux sociaux, s’avère précieuse, mais elle ne suffit pas à résoudre le problème de fond. Au-delà de l’émotion suscitée par chaque cas, la multiplication des annonces d’« enfants retrouvés » doit pousser à une réflexion collective.
Comment mieux encadrer les mineurs dans l’espace public ? Comment responsabiliser les familles ? Et surtout, comment éviter que ces situations ne deviennent banales, au risque de fragiliser davantage une jeunesse déjà exposée à de nombreux dangers ? L’heure est à la mobilisation de tous : parents, autorités et citoyens. Car derrière chaque avis diffusé, c’est un enfant vulnérable qui attend simplement de retrouver le chemin de sa famille